Intervention aux conférences-débats de La Criée à Reims le 21 octobre 2010, dans le cadre du thème de l'année 2010 - 2011 : « Politiques de l'hospitalité ».
« Accueille un visiteur qui t’étrangera mieux… »
Accueille un visiteur qui t’étrangera mieux
Et par un front rebelle activera ton jeu.
Montre toi connaisseur des façons de l’abord
Et dès la porte ouverte afin qu’on ne s’éloigne
Hôte à tort ne te montre oublieux de promettre
Une lueur d’abord entre tes quatre murs
Francis Ponge L’antichambre 1925
Parler, ouvrir l’année sur les « politiques de l’hospitalité » dans un lieu qui est l’hospitalité même est une gageure. Cette hospitalité, j’ai pu en prendre plusieurs fois la mesure à la lecture de l’intervention de Patrick Chemla aux journées de l’association « Europsy » et au cours des différents colloques organisés par la CRIEE, dont le dernier en juin 2010, en particulier au cours de l’atelier « Bricolages et constructions dans la clinique ».
La difficulté se renforce du fait, paradoxalement, que je suis psychanalyste. La psychanalyse par apport au déploiement de l’approche de la psychothérapie institutionnelle me paraît couver le danger d’être enfermée dans sa forme et de se retrouver parfois inhospitalière. Pourtant elle était subversive et hospitalière de la folie lorsqu’elle s’est imposée à Freud. A l’heure actuelle qu’est-elle devenue au regard de l’hospitalité ? Quand est-elle hospitalière et quand ne l’est-elle pas ? Bien plus, a-t-elle à être hospitalière ? Il semble sur ce point qu’en ce qui concerne J. Lacan, sa pratique et son discours, à ses débuts, l’aient été. Mais ensuite ? A force de tendre au trait du trait, de vouloir tout définir à partir du semblant et de l’imaginaire, de vouloir ramener le réel à un discours : les dits dépressifs (ce qui est intéressant et pas forcément faux), les psychanalystes ne s’isolent-ils pas insensiblement mais surement de la réalité sociale ? En quoi la double aliénation telle que Patrick Chemla la relève, le sujet divisé par son désir inconscient et travaillé par une aliénation sociale, entre-t-elle dans la réflexion et la pratique du psychanalyste ? Comment tenir les deux à la fois ?
Bref je me sens peu légitime pour vous parler ce soir. Et pourtant il y a de l’hospitalité dans le transfert au sens où pas n’importe quel accueil permet d’entendre la question du mal en tant que pulsion de destruction. Le psychanalyste reste encore celui à qui l’on s’adresse lorsque la pulsion de destruction, d’auto-destruction, autrement dit la jouissance qui mène au mortifère, prend le pas sur le désir. La personne qui vient voir le psychanalyste vient le voir dans l’espoir de renverser la balance, dans l’espoir que le désir puisse retrouver sa place et devenir plus fort que la pulsion de destruction. La question qui surgit immédiatement est celle de la mise du soignant. Quelle va être sa mise pour que le « retournement », le renversement puisse avoir lieu ?
Qu’en est-il de l’hospitalité ?
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