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Les commotions du réel: faire place à l’indétermination
Argument pour l’intervention au Cercle Freudien le mercredi2 mai 2018 :
Au temps de l’installation croissante dans le champ de la psychiatrie publique de recommandations de bonnes pratiques et de réponses fléchées et préétablies qui répondraient aux troubles diagnostiqués, il s’agira plutôt d’opposer à partir d’une pratique clinique dans un Centre d’Accueil et de Crise la manière dont un sujet peut apparaître dans les zones d’indétermination. Finalement, la position psychanalytique dans un tel dispositif engagerait face au passage à l’acte suicidaire des patients à ouvrir une passerelle du point de confrontation à un réel inassimilable à l’approche d’une vérité, vérité qui ne vaudrait pas solution ou mise en sens clôturante.
Remarque : la mise en ligne du texte de mon intervention implique une diffusion plus élargie et dépasse l’espace clinique dans lequel il a initialement été présenté; aussi j’ai pris la précaution de supprimer ou remanier certains passages relatifs à des situations cliniques.
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Lorsque Guy Dana m’a invité à intervenir, il m’avait déjà parlé du thème de travail
choisi par le Cercle Freudien cette année: «L’acte analytique dans tous ces états ».
Thème qui avait notamment vocation à interroger le spécifique et l’irréfragable de la pratique analytique dans le cadre de la cure type, mais aussi telle qu’elle se déploie au
sein de dispositifs institutionnels. C’est à partir de ma pratique dans un service de psychiatrie adulte –celui dont il a été chef de service pendant plus de trente ans jusqu’à
l’été passé –que j’ai choisi de parler.
L’argument du séminaire interroge la dimension sans équivalent de l’écoute analytique.
J’aimerais, pour ma part, plus particulièrement porter ma réflexion sur la dimension optico -‐transférentielle de l’approche analytique: je prendrai, comme je l’ai dit, pour point de perspective mon travail en tant que psychiatre dans un service qui a pour particularité de comporter une pluralité de lieux ambulatoires et hospitaliers rattachés à un hôpital psychiatrique situé en banlieue sud de Paris.
Plus particulièrement, j’aimerais dans cette intervention mettre en avant la nécessité de faire place à des zones d’indétermination,à un espace vide admettant l’incertitude. La position clinique à partir de laquelle un acte peut opérer pourrait s’y préciser.
A l’occasion d’une allocution en 1959 intitulée «On peut exiger de l’homme qu’il affronte la vérité 1»,Ingeborg Bachmann parle de la tâche de l’écrivain qui – dit-‐elle, « doit prendre la mesure de sa vérité et la rendre effective encore une fois, afin que nous puissions voir.» Elle rapporte cette exigence à un «état lucide, douloureux », non pas comme perception acquise des choses, mais comme compréhension de « ce que justement nous ne pouvons pas voir ». Et elle ajoute « Voilà ce que l’art devrait réaliser :réussir, dans ce sens là, à nous dessiller les yeux.»
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