MERCREDI 16 JANVIER 2013,
au local du Cercle freudien,
10, Passage Montbrun 75014 PARIS
à 21heures 15.
Daniel WEISS ouvrira l’année par un exposé sur le thème choisi pour l’année 2013 :
Destins du transfert dans la cure – Croyance et désir de l’analyste
Nous fêterons ensuite la nouvelle année autour d’une coupe de champagne et de la traditionnelle galette.
DESTINS DU TRANSFERT DANS LA CURE
Croyance et désir de l’analyste
La guérison est l’affaire de l’analyste. C’est ce que nous avons soutenu lors du dernier colloque du Cercle freudien, et ce moment fera date. Sommes-nous pour autant des guérisseurs ? Nous désirons savoir. Nous cherchons à mettre en lumière en quoi consiste la guérison psychanalytique. En d’autres termes nous entendons ne pas nous satisfaire des effets du transfert, mais soumettre celui-ci à l’analyse. C’est là que les difficultés commencent : analyser le transfert, ou du moins y prétendre, n’est-ce pas scier la branche sur laquelle sont assis les guérisseurs… les guérisseurs que nous sommes… Ou que nous pourrions être ?
Revenir sur la question du transfert nous paraît, en cela, nécessaire aujourd’hui…une fois de plus : afin de pouvoir rendre raison de ce qui fait la spécificité de notre discipline, la distinguant de toutes les thérapies psy, mais aussi et surtout afin de préciser, à chaque fois, en quoi il y aura eu de l’analyste dans une cure et par conséquent de l’analyse. Dans cette mesure, le transfert est à penser du début à la fin…. et donc aussi, comme nous l’a appris Lacan, de la fin au début.
Du début en effet, puisque « au commencement est le transfert ».
– Entendons « au commencement d’une analyse », évidemment, et c’est le transfert sur la psychanalyse et sur un de ses représentants supposé. Nous avons en cela à prendre en considération ce que sont aujourd’hui les conditions du transfert sur la psychanalyse.
– Ou « au commencement de la psychanalyse », et c’est « l’analyse originelle », le transfert de Freud à Fliess. Il nous faut repérer ce qui s’en transmet, jusqu’à aujourd’hui.
– Plus radicalement peut-être faut-il entendre « au commencement de l’inconscient » : pour la psychanalyse pas d’inconscient sans transfert.Ce que nous appelons habituellement « inconscient » en effet est ce savoir supposé aux formations qui se proposent au déchiffrage. Cette impossibilité de considérer l’inconscient indépendamment du transfert est ce qui différencie notre discipline d’une psychologie.
C’est aussi ce qui fait du rapport transférentiel à l’inconscient une croyance, croyance nécessaire à l’institution et au déroulement de l’expérience. « Glaübige Erwartung » dit Freud à propos de la médecine et de la psychothérapie, mais cette expression convient particulièrement bien à ce dont il est question au début d’une analyse. Attente croyante que Lacan évoque également à sa façon : « Il y a pas de doute, quiconque vient nous présenter un symptôme y croit » (Lacan RSI séance du 21 Janvier 1975). En d’autres termes « croyance » est un autre nom de cette supposition de savoir instituant l’inconscient dans la cure. Envisagé comme lieu de vérité, l’inconscient freudien implique la dimension de la
croyance.
Tout au long d’une cure nous avons à composer avec la croyance, et pas seulement pour guérir l’analysant « des illusions qui le retiennent sur la voie de son désir » (Lacan L’éthique de la psychanalyse séance du 11 Mai 1960). Elle se tient au cœur même du processus analytique, porteuse d’effets de symbolisation en tant que supposition d’insu, et génératrice d’obstacles imaginaires en tant qu’hainamoration avec laquelle nous avons à nous débrouiller. En ce sens poser la question des destins possibles du transfert dans la cure c’est interroger le devenir de la croyance dans l’inconscient comme lieu de vérité, tout particulièrement son devenir au terme de l’analyse.
Qu’en est-il donc à la fin ? À lire Freud on peut penser que la croyance transférentielle, ne semble pas devoir être remise en cause. Elle paraît même exigible de l’analyste :
« La tâche [de l’analyse personnelle par laquelle commence la préparation de l’analyste à sa future activité] est accomplie si elle apporte à l’apprenti la ferme
conviction de l’existence de l’inconscient » (Analyse avec fin et analyse sans fin).
Le renversement lacanien faisant de l’analyse de l’analyste le paradigme de la cure, implique un changement de perspective. Avec la séparation/separtition marquant un temps de fin quelque chose de la croyance est censé chuter pour laisser la place à ce que Lacan désigne comme certitude du sujet.
Qu’en est il concrètement ? Ce passage règle-t-il la question en instituant un autre rapport à l’inconscient pas entièrement réductible à la dimension de la vérité ? Permet-il par ailleurs une mutation dans le rapport aux croyances, à celles qui nous traversent que nous en sachions ou non quelque chose, à celles auxquelles nous adhérons et qui constituent le cœur de nos convictions (« fermes convictions » dirait Freud) ? On ne peut en effet envisager le transfert sous l’angle de la croyance sans poser la question du devenir des croyances des analysants.
Tout spécialement pour ceux qui, supposés avoir mené l’expérience jusqu’à un certain point, passent à l’analyste.
Est-il possible de prendre la mesure des effets des croyances de l’analyste ? Envisager la question sous cet angle permettrait peut-être de préciser en quoi consiste la certitude marquant selon Lacan le passage à l’analyste. Cela aiderait peut-être aussi à mettre en lumière ce qui nous anime quand nous prenons la parole dans le débat public et défendons certaines convictions au nom de la psychanalyse. Cela contribuerait également à éclairer une notion dont nous faisons largement usage, de manière parfois imprécise : celle de « transfert de travail », censé prendre la suite du « travail du transfert ».
Nous proposons de mettre au travail ces questions, et toutes celles qui pourront y faire écho, dans le cadre du Cercle Freudien au cours de l’année 2013.